Les exemples séculaires de coopération fructueuse pour l’eau ne manquent pas, comme Le
Conseil des Bons Hommes de la plaine de Murcie ou le Tribunal des Eaux de la plaine de
Valence, reconnus comme patrimoine mondial par l’UNESCO, qui y assurent la gestion de
l’eau depuis dix siècles, réglant les conflits de manière orale, rapide, transparente et
impartiale.
Aujourd’hui cette tache aussi vieille que l’humanité est confiée à un mastodonte de 2,2
tonnes, qui survole la Terre à 890 km d'altitude fruit, lui aussi, d’une coopération franco-
américaine de trente ans. Le 16 décembre 2022, une fusée SpaceX a mis sur orbite le satellite
SWOT (Surface Water Ocean Topography) depuis la base américaine de Vandenberg. Ce
satellite étudiera pour la première fois la quasi-totalité de l’eau à la surface de la Terre :
niveau des océans, des lacs, des rivières, évaluation des stocks d’eau douce, dynamique des
océans, conséquences des changements climatiques, etc. La plus haute technologie est
employée à surveiller le plus primaire des besoins !
C’est que la gestion de l’eau au niveau mondial est devenu un enjeu toujours aussi vital.
D’une part les besoins augmentent et d’autre part la géopolitique s’en mêle. « Au cours du
20ème siècle, alors que la population mondiale triplait, la consommation d’eau était
multipliée par six. L'eau douce est aussi une ressource très inégalement répartie: neuf pays
détiennent 60% de toutes les réserves du monde, alors que 17 pays sont actuellement menacés
par une grave pénurie. » Les tensions s’accroissent donc au Moyen-Orient, entre les États-
Unis et le Mexique, autour des fleuves africains, etc. La question de l’eau est souvent sous-
jacente à divers conflits.
Néanmoins, Christian Bréthaut, de l'Université de Genève et du Geneva Water Hub tempère
cette conflictualité dans Géopolitis : "l'eau génère plutôt des dynamiques de coopération". Le
chercheur cite notamment le cas du fleuve Sénégal, où les États riverains se partagent la
propriété des barrages et la gestion du fleuve.
Peut-être qu’une très vieille sagesse humaine reste à l’œuvre pour préserver l’or bleu, ce bien
vital qui appartient à tous.
Michel Seyrat